samedi 19 novembre 2011

Hadopi 3 : les propositions de Nicolas Sarkozy

Définitivement en campagne, Nicolas Sarkozy a ouvert la porte à une extension de la lutte contre le piratage au streaming, accusé de voler d’un côté et de vendre de l’autre. Le président a aussi annoncé que le centre national de la musique serait financé par une taxe sur les abonnements.

A chaque auditoire, son discours. Lors de son intervention au Forum d'Avignon devant l’industrie de la musique et du cinéma, Nicolas Sarkozy a clairement annoncé que la Hadopi pourrait être étendue au streaming.



« J'aime une musique, je veux la partager : la démarche n'est pas en soi négative. Sur les sites de streaming, l’idéologie du partage, excusez-moi, c’est l’idéologie de l’argent : je vole d’un côté et je vends de l’autre. Qu’on ne me demande pas de soutenir cela » a déclaré le très probable candidat à sa succession, cité par Le Monde et 01Net.

"On adaptera la législation", si la technologie le permet

Des propos qui tendraient donc à classer indistinctement tous les sites de streaming au même niveau, c’est-à-dire pourvoyeurs (avec rémunération à la clé) de contenus illicites.

Mais le discours a des chances de satisfaire les industriels des contenus qui pointent régulièrement la responsabilité en matière de piratage des sites de streaming et de téléchargement direct.

Toutefois, la lutte contre les contenus illicites sur ces plates-formes se heurte à des difficultés techniques. Et le filtrage pourrait donc une nouvelle fois être mis en avant, voire d’autres mesures de durcissement de la législation. Or, une telle réflexion, vivement soutenue par les studios et Majors, suscite actuellement un tollé aux Etats-Unis.

En outre, en juillet, la Hadopi, qui travaille à un observatoire du streaming et du direct download, rabrouait les ayants droit concernant leurs velléités autour de la question du filtrage.

« La conception et le déploiement de technologies de filtrage sont des questions hautement complexes et sensibles de nature à atteindre la neutralité, la sécurité des réseaux ou encore la protection de la vie privée. »

Le piratage P2P recule de 35% pour Nicolas Sarkozy

Pour la haute autorité, l’offre légale est la priorité des ayants droit, pas le filtrage. Devant les acteurs du numérique, en avril, Nicolas Sarkozy s’était aussi voulu plus consensuel, reconnaissant ainsi que le gouvernement avait commis quelques erreurs.

« J'ai bien conscience que la technologie évolue. Si la technologie nous permet une nouvelle évolution, on adaptera la législation » défend donc désormais le président de la République, ouvrant la porte à une Hadopi 3.

Nicolas Sarkozy a également défendu le bilan d’Hadopi, se félicitant ainsi d'un recul du piratage par P2P de 35%. S’il table sur une évolution de la technologie pour adapter la législation, le président oublie en revanche de noter que les usages aussi évoluent. Par ailleurs, dans son bilan d’activité, la Hadopi elle-même se montre prudente sur ses résultats.

D’autres modes de partage et de consommation (et pas seulement pour les contenus illicites) ont supplanté le P2P. En effet, depuis 2009, le P2P ne fait plus recette, quand au contraire le streaming se développe.

Un CNM financé par les abonnements Internet

En campagne, Nicolas Sarkozy est également revenu sur le dossier de la création d’un centre national de la musique (CNM), inspiré du CNC pour le cinéma et l’audiovisuel, dont la gestion est vivement critiquée par l'inspection des finances. Le financement du CNM sera assuré par un prélèvement sur les abonnements à Internet.

Pourtant, mercredi 16 novembre, en commission des affaires culturelles, le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand avait refusé de confirmer cette option. Un rapport est encore en cours et les pistes de financement pas encore tranchées soutenait-il.

Le président de la République anticipe donc en arbitrant directement avec une nouvelle ponction sur les abonnements Internet, sachant que les FAI contribuent déjà au CNC par l’intermédiaire du Cosip. Début octobre, la fédération française des télécoms (FFT) n’avait pas caché son hostilité à ce projet d'instauration d'une nouvelle contribution au profit de l’industrie culturelle.